Le Bord de l'Eau

SciencesHumaines.com | L’alt-right : de Berkeley à Christchurch

L’alt-right : De Berkeley à Christchurch, Simon Ridley, Le Bord de l’eau, 2020, 188 p., 22 €.

Régis Meyran
Mensuel N° 334 – Mars 2021

L’alt-right, apparue aux États-Unis en 2009, est le nom d’une communauté diffuse, sans véritable structure organisationnelle, faite d’idéologues, de geeks et d’extrémistes violents que l’auteur est un des premiers à présenter en détail au public français. Ce mouvement aujourd’hui mondialisé s’est fait tristement connaître par l’attentat de Charlottesville contre une manifestante antiraciste (2017) et par la tuerie dirigée contre deux mosquées à Christchurch en Nouvelle-Zélande (2019). Le terme même « alt-right » (ou « droite alternative ») traduit une tentative de donner une nouvelle image, plus cool et décomplexée, au vieux suprémacisme blanc. Simon Ridley en propose une généalogie intellectuelle et sociale : se réclamant à la fois du maccarthysme, de la pensée libertarienne, de la Nouvelle droite française et des théories du « grand remplacement », le mouvement est animé par Richard Spencer, qui a gravité dans des clubs de droite radicale avant d’animer divers sites Internet, et de fonder AlternativeRight.com. Brandissant l’idée d’un « génocide blanc » consécutif à une invasion de migrants et à la dictature des minorités culturelles, hostile aux féministes et aux communistes, complotiste et antisémite, le mouvement est un patchwork idéologique qui séduit les internautes les plus radicaux. La clientèle est surtout faite de jeunes hommes blancs se définissant comme « incels » (célibataires involontaires) qui se retrouvent de façon anonyme sur des forums comme 4Chan et 8Chan, pratiquent le harcèlement, le hacking, les jeux vidéo et la diffusion de mèmes, c’est-à-dire d’images devenues virales, comme la grenouille de la bande dessinée Pepe, contre l’accord de son créateur. Alors que le recrutement s’effectue sur les campus américains et notamment à Berkeley, les adeptes de l’alt-right sont aussi de plus en plus nombreux sur Internet, témoignant du renouveau inquiétant de l’ethnonationalisme blanc aux États-Unis, et au-delà dans l’ensemble du monde occidental.

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